La
saline de Varangéville, c’est évidemment de l’activité économique. Depuis
quelques années, elle s’est également dotée d’un volet touristique. Ce dernier
prend de l’ampleur, avec la récente extension du musée, installé au cœur de la
mine de sel.
Au fond c'est toute une histoire
Autant vous prévenir : on ne va pas tout vous dire ici. Mieux vaut préserver la saveur de la surprise pour celles et ceux qui descendront, prochainement ou un peu plus tard, au sein de la mine de sel varangévilloise et de son nouveau musée. Car récemment, ces galeries et salles chargées d’histoire industrielle, viennent de s’enrichir, à la faveur de nouvelles trouvailles faites à 160 m sous terre.
Initiées en 2018 sous la houlette de Denis Lhommé, ancien mineur ayant à cœur de faire connaître l’histoire du site et de ses hommes , ces visites touristiques dans l’unique mine de sel encore exploitée en France, s’appuyaient jusqu’alors sur quelques 600 m² d’espace muséal, entre matériel d’époque et panneaux explicatifs.
« Mais cet hiver,
nous avons créé une nouvelle salle, et ajouté 300 m² au musée, explique
Denis Lhommé, désormais en charge de ce service tourisme. Des engins et du
matériel que nous avions découvert en bas sont désormais exposés. » Car attention :
tout ce qui se trouve dans le musée de la mine… vient de la mine, étendue sur
300 km de galeries. « Rien n’a été descendu exprès », souligne
le responsable.
Ancienne pompe à essence
C’est ainsi que le grand public, outre les wagonnets, les bulldozers, les engins
Joy servant à ramener les blocs de sel après les tirs, et autres camions Berliet, croisera par exemple cette pompe à essence BP d’un autre âge — trace de la station de ravitaillement des engins. Il croisera également cette balance industrielle d’une capacité de 5 tonnes sur laquelle étaient posés les wagonnets, cette armoire à outils de 1947 ou encore ce véhicule, rouge mais grignoté par le temps et le sel (et resté sur ses essieux), ayant gagné ses galons à transporter l’indispensable poudre servant aux tirs.Saint Barbe, la patronne
Hommage aux hommes aussi, avec cette nouvelle exposition photos nominative, pour mieux pénétrer l’univers quotidien des mineurs. Et gros plan sur l’inévitable patronne des mineurs, sainte Barbe, présentée en textes et en illustrations.
Accrochées aux parois
également, cette civière d’un autre âge, et une attelle dite « en
grillage » pour jambe blessée « mais qui ne devait pas maintenir
grand-chose », sourit Denis Lhomme, pas peu fier du travail accompli, pour
des visites toujours plus immersives, projetant le terrien de surface dans ce
monde à part.
Coin photo
« Cet hiver, nous
avons aussi réalimenté tous les véhicules avec phares : désormais, ils
éclairent ; nous avons aménagé un petit coin dédié aux photos souvenirs à
la fin des visites et installé un parquet bois dans la salle dédiée aux
repas. »
Et à table, pas question de faire son malpoli, le nez sur son portable : à 160 m sous terre, aucun réseau évidemment… Comme au temps du premier mineur, dont le souvenir accompagne chaque touriste goûtant le sel de l’histoire.
Pour un repas insolite et gastronomique sur une table en sel gemme de 230 millions d'années (clic)
Une histoire riche et diverses anecdotes au musée
À table
Il est certainement le plus vieux sandwich du département, voire… du monde, qui sait ? Un casse-croûte de mineur a en effet été retrouvé un jour dans une galerie, encore emballé dans un journal de juin… 1938 !
Le pain est évidemment
jauni et immangeable, le fromage solidifié, et le tout présenté sous cloche
dans le musée, à côté du journal ( L’Est
Républicain , assurément…). « Certaines
personnes doutent de ça, mais en réalité, l’absence d’humidité et la présence
du sel, ont permis cette conservation », selon Denis Lhommé, responsable
du tourisme aux Salins.
Aux pieds
Sur un mannequin au cœur du musée se trouve une tenue vestimentaire à l’âgedifficilement déterminable. Mais un détail se remarque : aux pieds, il s’agit d’espadrilles. « Les premiers mineurs ne travaillaient pas en sabots, car ces derniers devenaient vite peu pratiques lorsque les hommes transpiraient des pieds… » Seuls les porions (contremaîtres) étaient chaussés de sabots, leur rôle consistant à surveiller et à répartir les tâches. Une mission bien moins physique…
En Anglais
En grosses lettres
capitales, l’inscription « Welcome » domine le visiteur qui entre
dans la salle des repas. Si l’usage de l’anglais semble ici trancher avec
l’ambiance locale, il s’explique : cette structure (faites de lettres en
bois) a été récupérée après avoir servi, en 1910, sur une sorte de salon
professionnel dédié à l’activité minière.
Question à : Denis Bigel électricien-mineur en retraite et membre de l’Amicale des Anciens des Salins
"Je retrouve ici des engins miniers que j'ai remis en état"
La mine, il y a
travaillé durant 5 années, de 1970 à 1975, avant de revenir « au
jour ». Comprenez, à la surface. Rencontre avec Denis Bigel, féru de
l’histoire de la saline de Varangéville.
Quel était votre rôle, au sein de la
mine ?
J’étais
électricien-mineur chargé d’assurer la distribution électrique générale en galeries ainsi que l'éclairage et l’entretien électrique des engins dédiés à l’abattage au front de taille (N.D.L.R. : opération réalisée à l’explosif, pour décrocher puis récupérer
de la roche et l’exploiter).
Électricien dans une mine, en quoi
est-ce spécifique ?
En réalité, sous terre on manque juste un peu d’air
frais , sinon ça ne change pas
grand-chose ! À mon époque, évidemment les conditions n’étaient pas les
mêmes que celles des premiers mineurs. On a aujourd’hui des transformateurs et
toute l’électricité nécessaire ici ! Les plus gros problèmes survenaient
en cas d’orage, quand on n’avait plus de courant… Même les ascenseurs ne
fonctionnaient plus, tout le monde devait alors remonter à l’échelle jusqu’à la
surface à la lueur des lampes.
Quel effet ça fait, pour un ancien
mineur, de se trouver dans ce musée de la mine ?
C’est toujours émouvant… D’ailleurs je retrouve ici certains engins que j’ai remis en état. Cette mine est riche d’histoire, ça me passionne. D’ailleurs, à ma retraite, après une petite formation, j’ai pu créer mon blog, « Le coin des becs salés », qui me permet de revenir longuement sur l’histoire de l’usine et de la mine.
Reprise des quartiers au front de taille en 1970 avec une convoyeuse chargeuse électrique Joy sur un transporteur Panhard à remorque surbaissée dédié au roulage vers la préparation mécanique du sel gemme. (matériel exposé au musée)
Reprise des visites le 28 février 2022
Après une pause hivernale, les visites de la mine reprennent ce lundi 28 février pour une saison 2022 marquée par la possibilité de repas gastronomiques dans l’une des salles (depuis 2020, des repas insolites, à base de produits régionaux, terroirs peuvent être pris sur une table en sel, à l’issue de la visite du matin).
Chaque visite guidée dure environ 3 heures, est accessible dès 13 ans (mais non accessible aux personnes à mobilité réduite) et se déroule par groupes de 25 personnes maximum, du lundi au jeudi (une en matinée, l’autre en début d’après-midi), voire certains samedis.
Reportage Journal EST RÉPUBLICAIN du 24 février 2022
Journaliste Stéphanie CHEFFER ------ Photographe Alexandre MARCHI
A lire aussi : Un restaurant à 160 mètres sous terre au musée de la mine de sel de Varangéville -
Par Éric MOLODTZOFF Journaliste FRANCE 3 LORRAINE
Musée mine VRG /db